Le sélectionneur de l’équipe de France masculine revient sur le dénouement du Mondial 2021 et se projette déjà sur la suite : le Tournoi de Qualification Olympique du 12 au 14 mars prochains.

Au regard du scénario du match, estimes-tu logique la victoire de l’Espagne ?
Nous avons été derrière tout au long de ce rapport de force avec l’Espagne. Même si nous avons été capables de proposer des choses intéressantes sur certaines phases, nous avons été pris dans le piège Rodrigo Corrales ou rattrapé par certaines maladresses malvenues. Il y a un peu de frustration sur des moments charnières mal maîtrisés et l’évidence d’une supériorité espagnole au répertoire plus stable et expérimenté que le nôtre.

Pour jouer ce dernier carré avec beaucoup d’ambition, l’équipe est apparue fatiguée. N’a-t-elle pas un peu manqué de carburant ?
Bien sûr, il y avait de la fatigue car les organismes ont été mis à rude épreuve durant ce Mondial. Du coup, on le termine un peu à l’arrache. Les scénarios des matches face à la Suède et à l’Espagne ne nous aident pas. On bataille, on n’est pas très loin de revenir mais malheureusement ces deux victoires nous échappent et nous empêchent de trouver notre happy end. Malgré un beau parcours, l’image renvoyée est plus liée à la déception de voir les choses nous échapper plutôt qu’à un manque de fraicheur.

Dans ce dernier carré, l’équipe n’a pas sur reproduire les prestations qui lui avaient permis de battre la Norvège et le Portugal…
Il est certain que sur ce Mondial nous avons alterné le très bon et le moyen, voire l’insuffisant. Voilà qui donne un bilan plutôt mitigé en termes de jeu. On peut voir cette compétition sous l’angle un peu négatif de ce qu’il nous a manqué, j’avoue préférer le regarder sous l’angle positif de nos progrès et notre avancée en dépit des conditions assez exceptionnelles et un contexte pas toujours favorable.

Le groupe n’a jamais renoncé en dépit des difficultés rencontrées. Est-ce aussi un motif de satisfaction ?
Je trouve que l’état d’esprit dégagé par ces Bleus est prometteur et de nature à donner de l’espoir pour la suite, même s’il y a encore du boulot. On ne peut pas se satisfaire du rôle de figurant sur un dernier carré. Ce n’est pas dans notre ADN.

Avant de t’envoler pour l’Égypte, aurais-tu signé pour figurer dans ce dernier carré ?
Nous aurions clairement signé à la sortie du contexte particulier de nos deux matches difficiles de qualification. On se posait beaucoup de questions et c’est aujourd’hui une satisfaction d’avoir trouvé ce chemin et réalisé ce parcours porteur d’espoirs pour le groupe. C’est satisfaisant pour la suite de la saison et les échéances encore plus importantes qui nous attendent.

Es-tu déjà en capacité de livrer un premier bilan ?
Nous avons encore le nez dans le guidon, à la sortie de 9 matches en 18 jours. Nous avons besoin de faire le point, de nous poser afin de bien évaluer notre parcours et notre production. Le debriefing doit aussi s’effectuer avec les joueurs. Il faut un peu de temps pour digérer l’événement et en tirer les enseignements. On n’oubliera pas la préparation tronquée, les difficultés rencontrées avec les blessés en amont et pendant la compétition. Si l’état d’esprit a été très bon, il existe encore des chantiers pour stabiliser nos performances. Par exemple, nous n’avons pas été capables de tuer nos adversaires. Nous aurons encore moins le droit à l’erreur lors du TQO.

L’équipe de France se présentera avec plus de confiance pour aborder ce TQO. N’est-ce pas l’un des bénéfices de la campagne mondiale ?
Nous avons réintégré le gotha des meilleures nations et laisser des grands noms derrière nous. Cependant, nous avons encore une bonne dose de travail à produire car on s’est bien rendu de nos insuffisances qui nous laissent un goût d’inachevé. Lors des trois matches du TQO nous aurons besoin de performances de tout premier ordre face à des adversaires, bien identifiés, que nous avons réussi à mettre derrière nous lors de ce Mondial.

Pour cela, il faudra pouvoir compter sur toutes vos forces…
Nous avons déjà payé un lourd tribut au sein du groupe avec trois joueurs blessés pendant la compétition (Timothey N’Guessan, Wesley Pardin et Luka Karabatic) en plus de la blessure d’Élohim Prandi en préparation. Nous avions aussi déploré, en amont, l’absence de Nikola Karabatic. Ce TQO est placé au milieu d’un calendrier national et européen démentiel. Bien sûr, le handball des clubs doit reprendre ses droits mais la projection d’un TQO qui se jouera au milieu de cet embouteillage, me pose souci pour l’intégrité physique de nos internationaux. Avec la crise de la Covid-19 et en cette année olympique, les organismes sont soumis à une charge exceptionnelle et j’espère qu’ils resteront en bonne santé.

Quel regard portes-tu sur le Danemark qui a conservé son titre ?
Les Danois sont en haut de l’affiche depuis plusieurs années. Ils ont pris le pas sur le handball mondial. Même s’ils se sont cassés les dents sur le dernier Euro, leur stabilité dans la performance est exceptionnelle. Leur jeu est très solide et est porté par de très fortes individualités.

À titre personnel, comment as-tu vécu cette première aventure à la tête des Bleus ?
Je la vis comme une magnifique expérience, avec passion aussi dans ce staff reconfiguré. Je sors grandis dans ce nouveau rôle qui, chaque jour, donne lieu à un nouvel apprentissage. C’est intéressant de vivre cela avec ce groupe qui a beaucoup œuvré et investi en janvier afin que l’on obtienne ces résultats. Voilà, nous avons beaucoup travaillé et pour nous désormais c’est aussi un moment d’évaluation du premier acte de ce nouveau chapitre. Nous avons plein de choses à améliorer.

Propos recueillis par Hubert Guériau