Le Congrès de l’EHF (Fédération Européenne de Handball) se tiendra jeudi 17 novembre à St Wolfgang en Autriche. Atteint par la limite d’âge (68 ans) Jean Brihault, président de l’EHF depuis 2012, ne pourra pas briguer un nouveau mandat à la tête de l’institution européenne. Le secrétaire général de l’EHF, l’Autrichien Michael Wiederer, est le seul candidat pour succéder au Français, en poste depuis 2012.

Vous allez présider jeudi votre dernier congrès. Avez-vous de l’appréhension au moment de quitter la fonction ?
J’ai toujours assumé sereinement les responsabilités qui auront été les miennes dans le Handball. J’ai travaillé dur, avec honnêteté. Je n’ai pas peur du vide derrière.

Avez-vous le sentiment du devoir accompli ?
Le point le plus satisfaisant est la popularité grandissante de notre sport qui se développe de façon considérable grâce au travail des fédérations nationales et des clubs. La qualité des organisations des championnats d’Europe et des « Final Four » des coupes européennes illustre ce succès. L’autre point positif est la mise en place du Conseil du Handball professionnel avec sa représentation des joueurs, des clubs et des Ligues issus des différentes nations. En revanche, je suis très déçu par deux représentantes féminines qui ont été improductives et du comité exécutif qui ont joué leur carte personnelle plus que de l’intérêt général. Nous avons recruté Alenka Cuderman qui réalise un formidable travail, et pas seulement en raison de son passé de handballeuse, puisqu’elle a occupé précédemment une position importante dans un établissement bancaire. Elle facilite l’installation du Conseil du Handball féminin qui s’appuie sur des représentantes très investies.

Quel sera votre avenir dans le Handball ?
Depuis mes jeunes années, j’ai poussé la machine intellectuelle à plein régime. Elle ne sera plus soumise à cette pression et ce sera bénéfique pour moi. Elle ne sera plus mise au défi d’imaginer, de négocier… Oui, cela va me faire drôle. Je sais que maintenant je n’ai plus ma place dans le monde du Handball et qu’il est temps pour moi d’aller beurrer les tartines à la mi-temps des matches de benjamins dans mon club. Je vais aussi prendre le temps de lire le journal au petit déjeuner et de tondre la pelouse.

C’est brutal…
Lorsque j’ai obtenu mon bac, je n’ai pas souhaité faire un métier dans le domaine du sport. Je n’avais pas le talent pour être joueur de haut niveau mais j’aurais pu être professeur d’éducation physique, comme beaucoup de mes copains. Je jouais en N2 lors que je préparais mon agrégation, puis arbitre pendant mon Doctorat, enfin j’étais délégué EHF alors que j’étais président de l’université de Rennes. Je ne suis pas en demande mais si on pense que dans certains créneaux je peux aider, alors je suis disponible. Je ne me sens déficient ni sur le plan physique et ni sur le plan intellectuel. Je suis recyclable.

Lors du Mondial 2017, l’équipe de France pourra donc compter sur un supporter supplémentaire ?
Les présidents continentaux sont de facto vice-présidents de l’IHF. Au moment du Mondial, j’occuperai toujours cette fonction jusqu’au conseil de l’IHF qui se tiendra à la fin du mois de janvier. J’ai tellement souvent désapprouvé les attitudes des dirigeants, parfois totalement inappropriées, que je ne vis pas les matches de la même façon.

Même si les deux derniers championnats du monde au Qatar (masculin) et au Danemark (féminine) ont été des succès, pour quelles raisons, selon vous, les organisations de l’EHF ont un standard plus élevé que celles de l’IHF ?
En raison d’un paramètre historique. Le Handball est un sport européen avec une culture de l’organisation des compétitions de haut niveau. De très gros progrès ont été accomplis dans des pays où il y a désormais une expertise. L’un des facteurs qui rend la tache difficile au niveau mondial, c’est le nombre de participants qui ne sont pas toujours habitués à évoluer sur des compétitions rigoureuses et demande beaucoup d’énergie pour les organisateurs. L’autre aspect est l’investissement énorme de l’EHF en terme de personnel, ce qui permet un contrôle direct sur l’événement.

Quelle sera la prochaine étape marquante du développement de l’EHF ?
Le développement est un phénomène à double tranchant. Il faudra bien gérer les accords avec les agences de marketing et de vente de droits aujourd’hui aux mains d’investisseurs qui attendent des revenus immédiats et élevés. Ils ne sont pas intéressés par tel ou tel sport mais par ceux qui ont la plus grande marge de développement, comme le Handball. Le football, à part construire des stades encore plus grands, ce qui n’est pas dans l’air du temps, dispose de moins de marge. Le Handball devra préserver une identité et une philosophie en parallèle de son développement.

Concernant l’Euro 2018 féminin organisé en France, le site de Nancy a été un temps remis en cause. Quelle position adoptez-vous lorsque un dossier concerne votre pays ?
Il est évident qu’il n’y a pas de différence à faire sur le plan des décisions, que ce soit en France ou ailleurs. Mais il y a évidemment une facilité d’information et de dialogue. Notre objectif est de maintenir un niveau d’excellence pour l’Euro. Le dossier de Nancy ne répondait pas totalement au cahier des charges mais il n’existait pas d’autres options. L’EHF a obtenu toutes les garanties afin que dans sa globalité l’événement soit un succès. Je suis certain que la France relèvera ce défi.

Qu’aimeriez vous que l’on retienne de votre action ?
Ce qu’en retiendra l’histoire du Handball dans des proportions modérées. Je crois que j’ai fait preuve de diplomatie en évitant d’aller à la rupture dans la relation avec qui que ce soit, notamment lorsque l’EHF était sous la menace de poursuites par les clubs. À la fois en externe et en interne, j’ai toujours essayé de privilégier le partenariat et le dialogue.

Quel est votre regard sur les nouvelles règles mises en place depuis le 1er juillet dernier ?
Les Jeux Olympiques ont été un test intéressant. La règle de la gestion de soins est excellente. Une partie du public, qui connaissait peu ou même découvrait notre discipline, s’enthousiasmait sur les situations de tir dans le but vide. L’application de cette règle séduit de nouveaux publics. Cette possibilité de jouer en surnombre était déjà possible auparavant. La Norvégienne Marit Breivik a été la première à utiliser alors la règle de la chasuble qui était fastidieuse et dissuasive. Au fond, ce qui est intéressant, c’est ce que les équipes vont en faire.