Un triomphe 6 étoiles
Dans un Championnat du monde 2017 remarquablement organisé et bâti sur mesure pour l’équipe de France, les Handballeurs français ont atteint l’objectif souhaité par tous leurs supporters : décrocher une 6e couronne mondiale. Depuis le premier sacre de Reyjkavic en 1995, en passant par Paris, Zagreb, Stockholm, Doha et à nouveau Paris, l’équipe de France a donc orné son maillot de 6 étoiles. Celle conquise ce dimanche 29 janvier 2017, est la plus brillante car elle est la plus visible : de Paris à Paris, en passant par Nantes, Lille, Rouen, Metz, Albertville et Montpellier, ce Mondial a fait vibrer la France du Handball et bien au-delà. L’immense couverture médiatique, l’abondance de partenaires économiques et le soutien massif des collectivités territoriales et de l’État, sont venus au relais d’un public de plus en plus nombreux, en témoigne la formidable affluence et l’ambiance dans toutes les salles. Au delà bien sûr de l’image de cette bande de mecs géniaux parés d’or qui prend place à côté des cinq autres glorieuses, l’impact du tourbillon du Stade Pierre-Mauroy de Lille-Métropole aura propulsé durablement le Handball français dans une autre dimension.

Dans un P.O.P.B. en fusion, les Bleus ont triomphé pour remporter un 6e titre, 16 ans après le sacre de 2001. (Photo FFHandball / S.Pillaud).

Un triomphe collectif
Exactement comme en 2001, l’équipe de France a bouclé son parcours victorieux en restant invaincue. Avec une compétition organisée à domicile, les Bleus devaient logiquement l’emporter. Mais évidemment, la tâche était énorme et la pression qui l’accompagnait aurait pu paralyser des garçons bouleversés à la sortie des J.O. de Rio. La 6e étoile n’était pas acquise mais la maîtrise collective et la culture de la gagne ont indiscutablement permis un sans-faute qui marquera les esprits. Hormis le forfait de Luka Karabatic dès le 2e match, le Mondial 2017 s’est disputé comme dans un rêve car le suspens s’était aussi invité dès le tableau final.

À Montpellier en mode Mondial
Au sortir de la préparation, aussi dédiée à la récupération, les hommes du duo Dinart – Gille effectuaient leur rentrée à Toulouse. Et ils ont peiné face à une équipe slovène toujours aussi habile. La victoire (29-27) tombait dans l’escarcelle des Bleus avec des performances notoires de ses demi-centres : le 100 % de Nikola Karabatic (6 buts) et les 13 buts de Kentin Mahé. De retour à Toulouse, Valentin Porte analysait : « Les premiers matches de préparation sont toujours brouillons. C’est positif de les affronter à nouveau dans 2 jours : on verra si notre jeu aura évolué. » Et effectivement deux jours plus tard, les Bleus mettaient de la distance avec la Slovénie (33-26). La superbe cérémonie d’ouverture dans l’Aréna de Montpellier et la solide victoire lançaient idéalement les Bleus dans leur Mondial. Seul bémol : la blessure de Timothey N’Guessan qui, comme aux J.O., était touché à la cheville sur l’ultime match de préparation.

Une bascule nationale
La veille du match d’ouverture les tenants du titre s’offraient un bain médiatique avec la centaine de journalistes massés au Frog, le QG des supporters installé au cœur de Bercy-Village. Un véritable moment de partage et de plaisir : les médias étaient comblés et passaient, sans états d’âme, en mode supporters. En soi, la prime à l’organisateur. Le matin Didier Dinart et Guillaume Gille avaient élaguer leur groupe pour livrer une liste sans surprise : Cyril Dumoulin, Nicolas Claire, Benoît Kounkoud et Dika Mem devaient se tenir en réserve de la République. La position de 17e revenait au champion du monde jeune, Yannis Lenne. L’Arc de Triomphe, sur la bien nommée place de l’Étoile, se drapait de toutes les couleurs pour envoyer un message aux Parisiens et au delà : janvier 2017 serait résolument Handball.

L’ouverture avec le Président Hollande
Le Brésil, privé de son redoutable arrière gauche, Petrus, laissait les Tricolores dominer les débats pour une entrée en matière parfaite. Une victoire aisée (31-16) et un impeccable. Si la cérémonie d’ouverture n’avait rien de Phénoménale, Feder jouait en live l’hymne officiel du Mondial 2017. En tribune officielle, entouré par Joël Delpalnque et Hassan Mustapha, François Hollande assurait la France du Handball du soutien entier de la nation. Les champions du monde en titre avaient réussi l’examen de passage et filaient à Nantes vers un destin XXL. « Nous avons pu faire les rotations nécessaires sans puiser dans les organismes, avec par exemple Nikola Karabatic qui est resté sur le banc en 2e période, » indiquait un Didier Dinart soulagé par cette belle entrée en matière. Face au Japon, la victoire était évidemment attendue (31-19) mais après quelques minutes, Luka Karabatic devait quitter ses coéquipiers. « C’est une performance globale de qualité qui nous permet d‘enchaîner par une 2e victoire et nous fait bien rentrer dans ce Mondial », appréciait Guillaume Gille. Le lendemain, Pierre Sébastien détaillait le diagnostic implacable pour le pivot parisien. Dans la foulée, Didier Dinart annonçait l’arrivée de Dika Mem tandis que Timothey N’Guessan allait rentrer dans les seize pour affronter la Norvège. D’aucuns ne pouvaient prédire qu’il s’agissait d’une finale avant la lettre : emmenée par Sander Sagosen, les Norvégiens poussaient les Bleus dans leurs retranchements. La bande à Karabatic sortait victorieuse à l’issue d’une fin de match heurtée (31-28). Autrefois une affiche terrifiante et alors que la France était plongée dans un froid glacial, ce France – Russie du 17 janvier réchauffait tout de même les supporters. Déjà qualifiés pour les huitièmes, les Bleus s’imposaient 35 à 24 avec un Adrien Dipanda de gala et auteur de 8 buts.

Les rotations avant Lille
Nikola Karabatic était invité à souffler. Un luxe offert par une première place acquise avant d’affronter la Pologne. Olivier Nyokas ravissait les habituels supporters du H, avec 7 buts dans son style si spectaculaire. L’arrière droit résumait la délicieuse semaine nantaise. « Devant mon public, c’était juste énorme et c’est une façon de le remercier le public. On passe en phase finale et il faudra être d’autant plus vigilants car nous n’aurons pas le droit à l’erreur. Je suis content de pouvoir soulager mes partenaires et franchement cela me rend heureux de montrer en tant que remplaçant qu’on peut tenir la dragée haute aux adversaires sur un match international. »

Nedim Remili a été élu meilleur arrière droit du Mondial. (Photo FFHandball / S.Pillaud).

L’incroyable ascension
Le stade Pierre Mauroy était transfiguré et plus sublime encore : un véritable écrin pour le Handball. La température était glaciale mais le Comité d’Organisation avait pris toutes les précautions possibles : quelques courants d’air rappellent l’incroyable défi mais rechercher une autre anomalie, ce serait vouloir percer le regard de la Joconde. La vision est hallucinante : 28 010 spectateurs poussent derrière les Bleus qui s’imposent en mode diesel sur les Islandais par 31 à 25. « Nous savions que ce serait difficile ce soir. Nous n’avions pas envie de rentrer chez nous dès demain. Nous avons pu savourer avec le public. C’était grandiose, confiait dans un grand sourire Michaël Guigou meilleur artificier de la soirée avec 6 buts. Le lendemain Claude Onesta effectuait un retour gagnant en conférence de presse pour confier son bonheur de constater un tel engouement populaire. L’après-midi allait livrer les premiers coups de semonce du Mondial : l’Allemagne, championne d’Europe et le Danemark, champion olympique, tombaient respectivement face au Qatar et à la Hongrie.

La marche victorieuse
Les Bleus s’offraient un nouveau bain de foule à Lille avec une Suède et son profil de parfait outsider. Thierry Omeyer et sa troupe allaient souffrir le martyre pour venir à bout des Scandinaves. Menés à la mi-temps (15-16), les quintuples champions du monde étaient encore tenue en échec à 10 minutes du terme (26-26, 50e). Le DTN, Philippe Bana raconte l’intimité du vestiaire : « Au moment où le silence est pesant, Nikola Karabatic prend la parole pour dire : « Pourquoi on baisse la tête ? Il n’y a aucune raison. Ne vous laissez pas aller. Relevez la tête. On va y arriver ! » Là, nous étions au fond et on a poussé pour remonter à la surface. » L’épatant Nedim Remili poursuivait son festival entamé en début de seconde période. Didier Dinart n’avait pas non plus hésité à lancer Vincent Gérard au relais de son capitaine : un choix décisif pour rentrer en demies avec un succès 33 à 30. À défait d’avoir gagner le match des défenses, l’attaque tricolore était plus riche et plus précise. Le Guadeloupéen ne cachait pas sa satisfaction : « Rejoindre Paris était l’objectif majeur depuis le match d’ouverture face au Brésil. Nous avons aujourd’hui ouvert la porte aux médailles. On va se battre pour décrocher la plus belle des médailles pour nous, pour le public et pour nos dirigeants. » La popularité d’une équipe se mesure dans les salles et en dehors. L’accès au quai du TGV de la gare de Lille-Flandres était neutralisé pour le confort des Handballeurs français. À Paris, c’est un bus Phénoménal et une escorte imposante qui favorisaient une traversée de Paris toutes sirènes hurlantes vers un établissement hôtelier gardé secret pour raison de sécurité. L’Espagne allait chuter face à l’éternelle Croatie qui rentrait dans un carré inédit avec le voisin slovène, le prochain adversaire des Bleus, et la Norvège.

À la fin ce sont les Français qui gagnent
Seize ans après, Daniel Narcisse, Thierry Omeyer, Guillaume Gille et Didier Dinart retrouvaient l’antre qui les avait vu remporter la 2e couronne mondiale. Depuis, ces quatre là ont largement contribué à la conquête d’étoiles supplémentaires. Exactement 15 jours après l’entrée victorieuse sur le Brésil, l’équipe de France livrait une demi-finale conquérante face à la Slovénie (31-25). Vincent Gérard réalisait une nouvelle partie décisive avec 16 arrêts et les rotations étaient une fois encore payantes. « Je mesure tous les efforts et tous l’investissement des garçons. Je suis très fier ce soir. On s’est donnés la possibilité d’accéder à la finale. Nous sommes à une heure, à un match, de conserver le titre mondial », lâchait, la mâchoire serrée, un Guillaume Gille plus concentré que jamais. Meilleure attaque et meilleure défense, l’équipe de France ne pouvait pas terminer autrement que par un triomphe. Miraculée en demi-finale face à la Croatie, la Norvège allait disputer sa première finale internationale. Un adversaire piégeux pour une équipe de France archi-favorite dans sa 7e finale mondiale depuis 1993.

La Norvège a – seulement – donné la leçon pendant 25 minutes
La 1e mi-temps allait confirmer les craintes d’un scénario cruel. Les Norvégiens de Christian Berge jouaient leur va-tout avec un jeu extrêmement rapide et d’une efficacité redoutable. Après un quart d’heure de jeu, les Bleus comptent trois buts de retard (7-10) et Vincent Gérard entre au soutien de Thierry Omeyer. Le changement dans les bois n’est pas immédiat : à la 25e minute, les Norvégiens possèdent toujours un +3 (13-16) agaçant. Avant de rentrer aux vestiaires, les Bleus remettaient les pendules à l’heure avec Daniel Narcisse, Nikola Karabatic, Kentin Mahé et Valentin Porte dans un numéro de soliste impressionnant. 18-17 à la pause : les Norvégiens avaient laissé passer leur chance d’autant qu’au retour, les arrêts de Vincent Gérard et les 2 buts consécutifs de Michaël Guigou reléguaient les Scandinaves à -3 (20-17). Les Bleus effectuaient un formidable travail défensif en plus d’une efficacité retrouvée face au portier Torbjorn Bergerud, brillant en 1e mi-temps. Jackson Richardson et Olivier Girault étaient hilares dans la tribune de presse, l’hystérie collective pouvait débuter pour célébrer cette formidable équipe : Nikola Karabatic (5e but) et Cédric Sorhaindo garantissaient la victoire aux Bleus qui mènent désormais 32 à 24 à moins de 6 minutes du terme. La Norvège étincelante en première période n’avait pas survécu au 2e acte (33-26) : les Bleus devenaient champions du monde 2017, pour la 6e fois. « C’est un bonheur d’être sacré. J’ai encore du mal à réaliser car il y a eu beaucoup de sacrifices et de stress, rapportait un Didier Dinart hilare. Il y avait énormément de pression car nous avions un devoir de résultat. »

Résultats :
Tour préliminaire :
France
– Brésil : 31-16 / Japon – France : 19-31 / France – Norvège : 31-28 / Russie – France : 24-35 / France – Pologne : 26-25
Huitièmes de finale : France – Islande : 31-25
Quarts de finale : France
– Suède : 33-30
Demi-finales : France – Slovénie : 31-25 / Croatie – Norvège : 25-28
Places 3-4 : Slovénie
– Croatie : 31-30
Finale : France – Norvège : 33-26