En conclusion de la semaine « Sport Féminin Toujours », Nodjialem Myaro, ancienne internationale de handball et actuelle présidente de la LFH, évoque son métier de psychologue et de préparatrice mentale qu’elle exerce depuis des années.

On te connait avec ta casquette d’internationale de handball puis de présidente de la Ligue Féminine de handball mais tu es aussi psychologue-clinicienne du sport. Comment t’es-tu engagée sur ce chemin ?
La psychologie, en plus du handball, a toujours été l’une de mes passions. Je me suis toujours interrogée et intéressée à l’être humain, à son mental, à sa psychologie. C’est pour cela que j’ai fait une fac de psychologie quand j’étais à Metz et j’ai parallèlement suivi ma carrière de sportive de haut-niveau.

Aujourd’hui, depuis combien de temps exerces-tu ce métier ?
J’ai dû faire en fonction des clubs où j’ai pu jouer pendant ma carrière. J’ai eu mon diplôme au début en 2003 lorsque j’étais au Danemark et une de mes motivations pour laquelle je suis rentrée en France, était de pouvoir exercer ce métier. J’ai été psychologue au Havre puis à Plan-de-Cuques où je travaillais au CREPS d’Aix-en-Provence. J’ai travaillé ensuite en libéral puis dans une clinique qui accompagnait les personnes obèses.

Depuis combien de temps exerces-tu ce métier ?
Au départ, mon travail de psychologue n’était pas dédié au sport mais mes différentes expériences dans les CREPS m’ont permis progressivement de me spécialiser dans la psychologie du sport. À mon arrivée à Toulouse, j’ai intégré la clinique Médipôle, une clinique de rééducation qui accueille des sportifs blessés. J’ai ensuite exercé au CREPS de Toulouse puis au Toulouse Football Club et parallèlement à cela j’ai fait des formations qui me permettaient d’entrer dans la psychologie du sport. Être psychologue et préparatrice mentale est une très bonne chose selon moi parce que tu peux accompagner les personnes de manière beaucoup plus complète, en le considérant comme un individu à part-entière avec des problématiques personnelles qui peuvent être abordées en parallèle de la rééducation et / ou de l’accompagnement à l’optimisation de la performance.

Justement aujourd’hui, la place de l’accompagnement mental et psychologique des athlètes c’est une grosse part de la performance sportive ?
Selon moi, elle est primordiale. En France, nous sommes en retard par rapport à d’autres pays comme
les États-Unis d’Amérique ou le Canada sur la place qu’on peut donner à la préparation mentale. On voit que c’est en train de se mettre en place, les clubs et les fédérations sont en train de faire bouger les choses mais il y a toujours l’idée que l’on va voir un psychologue ou un préparateur mental seulement s’il y a un problème, c’est encore assez tabou en France. Aux États-Unis d’Amérique, par exemple, c’est totalement l’inverse, si tu n’as pas de psychologue c’est qu’il y a un problème parce que tu ne vas pas travailler sur toi.

Comme la préparation mentale et la psychologie ne sont pas des choses « tangibles », elles ne sont pas encore considérées comme une vraie partie de la préparation ?
C’est ça, il y a un côté un peu invisible où ne se rend pas compte de ce que l’on travaille parce que c’est le cerveau. Quand tu fais de la préparation physique, tu peux dire de manière très chiffrée combien de tu as pris en vitesse, en masse musculaire… La perception de la préparation mentale tu peux la voir parce que l’athlète va gagner en confiance mais on n’aura pas systématiquement de données chiffrées, quelque chose de plus scientifique.

En cas de blessure, comment cela peut-être un vrai moyen de guérison pour l’athlète ?
Déjà il y a la prise en considération de l’athlète qui est blessé parce que parfois un athlète blessé est mis de côté, il perd un peu son statut qui apporte à l’équipe. Il y a aussi des moments de rupture en fonction de la gravité de la blessure où tu accompagnes le sportif à passer des caps : c’est un corps qui t’a « trahi » donc il faut accepter que tu ne t’exprimes plus à travers ce corps-là et que tu doives prendre un autre rythme. Ensuite, il y a tout le versant préparation / imagerie mentale où tu peux travailler avec le sportif qui est blessé pour qu’il puisse avoir une meilleure visualisation de ce qu’il se passe à l’intérieur de son corps et de ses sensations.

Tu as déjà connu des cas où la préparation mentale et la psychologie ont permis de surmonter des problèmes physiques et / ou mentaux ?
Oui, j’ai des sportifs de haut-niveau qui, à un moment donné, vont craquer parce que tout ce travail mental et psychologique va leur permettre d’exprimer des choses de leur passé qu’ils n’avaient jamais exprimé auparavant. Parallèlement à cela, ça permet d’avoir une petite parenthèse où tu te poses, tu travailles sur des choses qui sont difficiles. Il y a de l’accompagnement qui est fait pendant la période de blessure, il y en a certain qui utilisent cette période pour se réathlétiser et revenir au plus haut-niveau et parfois, il y a des suivis plus longs, continus parce qu’il y cette prise en compte de ce besoin de parler de soi.

Cette année, la thématique de la semaine « Sport Féminin Toujours » c’est le sport comme remède. Qu’est-ce-que tu penses du fait qu’aujourd’hui le sport peut aider les athlètes mais aussi les personnes lambdas à surmonter des difficultés ?
C’est une conviction. Parallèlement à mon activité de préparatrice mentale et de psychologue, j’interviens aussi en cancérologie et on se rend compte, à travers les chiffres, que la pratique sportive pour les personnes qui ont eu un cancer leur permet d’abord d’être plus en forme et de réduire les risques de récidives. D’un côté préventif, on sait qu’un enfant ou même un adulte va se sentir mieux dans sa peau et dans sa tête quand il pratique du sport.

Propos recueillis par Diane Prouhet