Président du Castanet Ramonville Auzeville Handball depuis cinq ans, Fabien Beth est très fier de permettre aux licenciés du CRAHB d’évoluer sur des sols prestigieux utilisés par les équipes de France ou lors des Jeux olympiques de Paris 2024. L’inauguration est programmée au 7 mai.
Avant toute chose, parlez-nous de votre club, le Castanet Ramonville Auzeville Handball.
Il s’agit d’un club de la banlieue toulousaine qui compte 600 licenciés, féminins et masculins, ce qui en fait d’ailleurs le 12e club en France, professionnels et amateurs confondus, en terme de licenciés. Il existe depuis 30 ans, avec différentes étapes dans sa construction. Il a d’abord concerné une première commune, puis une seconde, il y a eu une entente, puis une fusion. Aujourd’hui, il est implanté sur trois communes, Castanet-Tolosan, Ramonville-Saint-Agne et Auzeville-Tolosane. C’est surtout un club dont les valeurs sont assez fortes. Je suis très sensible au fait qu’une valeur ne doit pas simplement renvoyer à un logo ou à deux-trois mots vite griffonnés, mais qu’elle doit être incarnée au quotidien. Et les trois valeurs centrales qui nous définissent sont : famille, coresponsable et ambitieux. Si nous n’étions pas engagés solidairement et ambitieux, jamais nous n’aurions pu porter ce projet.
Ce projet, justement, comment est-il né ?
Le besoin a d’abord été suggéré par un joueur d’une équipe adverse qui se moquait de notre sol qui était, pour être tout à fait sincère, très dur. On venait de gagner notre montée en N3. J’ai entendu cette boutade et je me suis dit : il faut qu’on change de sol. Nous avons effectué des devis pour des sols neufs d’entrée de gamme. Tout compris, ça ne rentrait pas dans possibilités de nos Mairies. Et puis il y a eu ce match de l’équipe de France face à la Roumanie au palais des sports André-Brouat auquel nous étions invités. Je n’étais pas tenté plus que ça, mais mon épouse a insisté. Dès notre arrivée, nous sommes tombés sur Michael Boutines qui était alors le président de la Ligue. Nous avons évoqué le sujet, mais il m’a assez vite signifié qu’il ne pourrait pas grand-chose. Et puis, très vite là-aussi, il a évoqué ce sol de l’équipe de France qui pouvait être revendu après X utilisations. Nous étions alors au mois de novembre 2023. Michaël m’a rappelé pour me dire que l’éventualité existait effectivement, et tout s’est réellement accéléré fin janvier 2024.
Et vous avez donc pris contact avec Gerflor ?
Non, pas du tout. Je me suis d’abord assuré qu’il n’y avait pas de liste d’attente, d’autres candidats, puis j’ai fait estimer le coût, de l’achat et de la pause complète, avant d’envisager les possibilités de financement.
Qu’est-ce qui vous a décidé à vous lancer ?
De par mon ancienne vie de chef d’entreprise et de créateur de startups, j’avais dans mon répertoire le contact de l’agent de Nikola et Luka Karabatic, Bhakti Ong. Je lui ai présenté le projet. 48 heures après, il me rappelait pour me dire que Nikola et Luka était partants pour participer au financement par le biais de leur fondation. J’avais été assez discret jusque-là, y compris avec mon CA, même si j’avais l’intime conviction que le projet était réalisable, mais avec ce go-là, j’ai commencé à communiquer en interne. Puis on a demandé aux Mairies de nous aider.
Vous ont-elles suivi ?
Elles ont contribué à un peu plus de 50%. Un des Maires nous a signifié qu’il n’était pas content que le sol soit sur une autre commune, et c’est pourquoi nous avons mis une option sur le sol des Jeux olympiques, qui constitue la deuxième étape du projet.
Vous avez donc démarré la fameuse campagne de financement…
Oui, et tout est allé très vite. On a démarré au mois d’avril, et on a cru finaliser au mois de septembre-octobre.
Cru ?
On a reçu le devis pour la pause, et on n’était plus dans les clous. Le projet a vraiment failli s’arrêter. Et puis, comme en sport, on a convenu que si l’on avait perdu la première mi-temps, il fallait emporter la seconde. Tout le monde s’est mobilisé. Nous avons collecté 45 000 euros de la part de donateurs particuliers qui sont pour la plupart des adhérents de notre club, mais pas seulement. Leur famille ont participé, des gens de la commune qui ont leurs enfants au Collège ou au Lycée, également, d’autres associations aussi, je pense aux clubs de badminton ou de basket par exemple. Ce projet a été initié par le CRAHB, mais il a embarqué tout le monde, le comité, la ligue, la FFHandball. Au final, je le reconnais volontiers, c’est quelque chose qui nous a un peu dépassés.
Parce que ce genre d’aventure est finalement assez inédit ?
L’ASPOM Bordeaux avait effectué la même démarche deux années auparavant, et nous avons d’ailleurs consulté le club pour nous conseiller. Non, dépassé par l’engouement, l’effervescence. Je vais vous donner une ou deux anecdotes. Un handballeur du club a décidé d’acheter toute la zone du gardien de but. Des enfants issus des U11 et U13 ont cassé leur tirelire pour mettre l’argent en commun et faire une donation. Les seniors filles ont organisé un vide-grenier dont le bénéfice a été investi dans le projet. En fait, nous sommes très vite parvenus à cette somme de 45 000 euros auxquels on a ajouté d’autres versements directs, celui du fond de dotation Karabatic, mais également des aides du Lions Club de Castanet par exemple, et d’autres partenaires comme la Caisse d’Epargne Midi-Pyrénées, Butagaz…
Quel était le montant minimum pour la cagnotte ?
Au début, 50 euros. Et puis nous l’avons diminué dans un second temps pour permettre au plus grand nombre de participer. Chacun aura d’ailleurs un petit cadeau lors de l’inauguration du 7 mai.
Parlez-nous des différentes étapes de l’installation.
Je n’étais pas sur Toulouse lors de l’arrivée du sol de l’équipe de France, mais c’était évidemment un grand moment. La pause de la première dalle au gymnase Jean-Jaurès de Castanet-Tolosan également. Comme le sol a été achevé au mois d’août, nous avons pu démarrer la saison dans des conditions optimales. D’ailleurs, j’ai encore une anecdote, certains seniors qui avaient décidé de mettre un terme à leur carrière ont rempilé une année pour le simple plaisir d’évoluer sur un sol aussi prestigieux.
Et le sol des JO ?
Il a été livré à la fin du mois de décembre 2024, mais la Mairie de Ramonville-Saint-Agne ne pouvait pas le stocker. Heureusement, l’un de nos sponsors avait de l’espace pour le conserver avant la pause, et nous a même offert la livraison. Il a été installé à Léo-Lagrange pendant les vacances de février. Il y a eu un peu de retard sur l’installation des cages et c’était assez cocasse de constater que pendant trente ans les joueurs se sont entraînés sur un 38×18 avec sol dur et cages, pour passer à un 40×20 prestigieux mais avec des cages de Hand à 4 !
Qui va profiter de ces sols en plus des licenciés du CRAHB ?
Les scolaires, d’autres associations bénéficiaires…
Sans ces sols, pensez-vous que vous auriez pu accueillir l’équipe de France HandSourd au mois de janvier dernier ?
Ça y a forcément contribué. C’était un moment marquant avec la Marseillaise, le maillot de l’équipe de France et ce sol de prestige.
Vous dites également que la sécurité des joueurs a été un élément déterminant de l’aventure…
Bien sûr, et nous avons clairement monté ce projet pour changer de sol et diminuer les risques de blessures, de commotions, de périostites… Ensuite seulement, nous avons pensé à l’impact, aux retombées. Ce projet a renforcé l’engagement de tous au sein du club. On ressent une forme de fierté à appartenir au CRAHB. Aucun autre club ne dispose de deux terrains avec cette histoire. D’autres terrains des JO ont été distribués dans les territoires, mais deux dans un même club…
Comment se matérialise ce regain d’engagement au sein du club ? En terme de licenciés ?
Pas forcément, non. On est passé de 350 à 600 licenciés en cinq ans, et on est au maximum de nos capacités d’accueil. On ne va pas chercher à prendre de nouveaux licenciés, sauf dans certaines filières ou catégories d’âge. On préfère privilégier ceux qui sont déjà dans la famille. Ce regain se matérialise à d’autres niveaux. Nous avons par exemple lancé un appel à bénévolat l’an passé. Nous sommes passés de 6 commissions à 25. Pour les jeunes, on ressent une envie d’être meilleurs. Pour les adultes, il y a eu deux effets : avant de chercher à être plus performants, ils ont cherché à en profiter. La question de la performance est venue dans un deuxième temps.
Ce projet ne risque-t-il pas de vous griser avec des reportages à la Télévision, dans les médias ?
Au début, il y avait sans doute quelque chose d’effrayant. Mais ce risque de prendre la grosse tête a vite été balayé. Ce projet, c’est une aventure de club, une histoire de famille. J’y reviens, mais l’essentiel est de rester familial, coresponsable et ambitieux. On a un sol de l’équipe de France, un autre des Jeux olympiques, mais nous ne sommes ni champions du monde, ni champions olympiques. Nous avons la chance d’avoir au club une personne qui a fait 30 ans dans la com et qui nous a aidé à relayer nos messages.
Un mot pour finir ?
Merci. Ou plutôt gratitude. Merci à toutes les personnes qui ont mené ce projet. Merci à Isabelle, Cédric, Gérard, Sara, Geoffrey, Stéphane, Nicolas, toute la team communication, et à tous ceux qui ont contribué au sein du CRAHB et au-delà du CRAHB.