Après quatorze années de service, Raphaëlle Tervel avait décidé de mettre un terme à son histoire d’amour avec l’équipe de France. Mais l’envie d’achever l’aventure autrement que sur l’indescriptible déception des JO a été plus forte. Cette ultime parenthèse fait le bonheur de ses coéquipières, dont les mots disent tout le respect et la confiance que leur inspire une joueuse indispensable à la famille bleue.

Certains regards ne trompent pas. Comme ceux de Camille Ayglon, Alexandra Lacrabère, Siraba Dembélé ou encore Nina Kanto, cherchant le mot juste, le plus fidèle pour évoquer le monument Raphaëlle Tervel. Avec sincérité, chacune a fini par s’exprimer. « Indispensable ». « Bible ». « Fédératrice ». « Patiente ». « Raph, c’est la sagesse incarnée. Elle est calme, sereine », souffle Alexandra Lacrabère. « Elle est? l’équipe de France ! Raphaëlle, c’est le handball », sourit Nina Kanto. « Un leader naturel. Discret, qui fait toujours passer l’intérêt général avant le sien », ajoute Camille Ayglon.

A 33 ans, et après plus de quatorze années en équipe de France, « Ruffy » est évidemment la doyenne des Bleues, la plus capée (245 sélections). Elle est le témoin entre les générations qui ont écrit l’histoire du handball féminin français, depuis celle qui a, sans elle, conquis la médaille d’argent en Norvège en 1999 jusqu’à celle présente en Serbie en ce mois de décembre 2012.

La troupe française a pourtant dû faire sans elle, en octobre, lors de ses retrouvailles au Danemark pour la Golden League. « C’était un moment compliqué pour le groupe. On était en crise après le traumatisme des JO, se souvient Camille Ayglon. Je pense que même avec Raph, ça l’aurait été aussi. On avait besoin de ressouder le groupe, d’échanger, mais elle n’était pas là pour l’initier. Il a fallu faire sans elle. » « Il y avait comme un vide. Peut-être plus particulièrement pour moi, qui partage sa chambre depuis quatre ans », confie Alexandra Lacrabère. « A tel point que je l’ai appelée après la compétition pour lui demander de revenir. Parce que ça n’était plus pareil sans elle. J’ai eu le sentiment de faire partie d’une équipe très jeune, alors que nous jouons ensemble depuis plusieurs années. J’étais un peu perdue ». A la requête de Lacrabère, Tervel répond par la négative.

Ayglon : « Vous n’imaginez pas le boulot qu’elle fait dans l’ombre »

?Quelques semaines plus tard, son retour sous la bannière bleue est annoncé. « J’ai appris la nouvelle avec plaisir et soulagement, raconte Siraba Dembélé. Tout simplement parce que ce groupe qui vit bien, qui est équilibré, a besoin d’un leader. Et qu’avec Raphaëlle, malgré sa discrétion et son humilité, tout devient naturel. » « J’étais heureuse, se souvient Camille Ayglon. Heureuse parce qu’elle est un élément indispensable dans la vie de l’équipe. Vous n’imaginez pas le boulot qu’elle fait dans l’ombre. Je pense à la préparation des matchs. Quand on se réunit entre joueuses. Elle a une telle expérience, une telle culture handballistique… Elle apporte énormément, et elle est capable de tels sacrifices pour le bien-être de l’équipe. N’importe quel entraîneur rêverait d’avoir une fille comme ça dans son groupe. »?

Une fille capable de passer outre le crève-coeur d’une élimination en quart de finale des JO de Londres, pour son dernier match en bleu, et de dire en face à ses copines toute la confiance et le potentiel qu’elle place en elles. « On a tellement pleuré, raconte Nina Kanto. A ce moment-là, tu réalises tout ce qu’elle a donné au handball. Dans son discours d’adieu, tout était positif, elle nous a dit qu’on avait une super équipe, qu’on n’avait pas eu de médaille à Londres, mais qu’il ne fallait pas douter, ni baisser les bras. Qu’on avait tout ce qu’il fallait pour être au sommet. Je sentais déjà qu’elle n’avait pas envie de quitter le navire. Et je savais surtout qu’elle avait encore tant à donner.»?

Le 16 décembre prochain, Raphaëlle Tervel pourrait bien donner, cette fois, sa dernière représentation sur la scène internationale. « Elle va nous manquer. Et je ne sais pas encore comment on va vivre sans elle, soupire Siraba Dembélé. Mais je ne veux pas y penser. Pas encore. Elle est là, parmi nous. » Pour guider une dernière fois le handball féminin vers un titre que ses coéquipières désirent, plus que tout, partager avec elle.