Championne du monde en 2017, championne d’Europe en 2018, médaillée d’argent aux Jeux olympiques de Rio, Camille Ayglon-Saurina, sélectionnée à 270 reprises entre 2007 et 2019, est désormais l’adjointe d’Éric Baradat sur le banc de l’équipe de France U20F.

Tu te demandais parfois, après avoir mis un terme à ta carrière en 2021, et alors que tu menais de front de nombreux projets, si tu étais sur le bon chemin. Mais avais-tu imaginé que ce chemin te mènerait sur le banc de l’équipe de France U20 F ?

Pas du tout. Lorsque j’ai passé mes diplômes à Nantes, c’était surtout dans un souci de transmission, de partage d’expérience, mais sous une forme que je n’avais alors absolument pas déterminée. D’autant que je souhaitais casser avec ce rythme chronophage du handball professionnel, lorsque tu es un peu esclave d’un calendrier infernal. Mais bon, j’avais rangé l’idée dans un tiroir en me disant qu’il serait toujours temps de la ressortir un jour.

Quand Éric Baradat t’a-t-il sollicité ?

Au mois de mai dernier. Il m’a dit : j’ai un truc à te proposer. Sens-toi à l’aise, je ne te demande rien d’autre que d’étudier l’idée. J’ai d’abord été étonnée, puis honorée qu’il pense ainsi à moi. J’ai pesé le pour et le contre. J’avais déjà de nombreux projets engagés et je ne voulais pas qu’il y ait trop d’interférences. Mais sincèrement, je ne pouvais pas dire non.

Parce que c’est Éric ?

Parce que c’est un projet qui cadre avec ma philosophie, avec toujours ce même fil conducteur : la transmission. Accompagner de jeunes filles au début de leur parcours, essayer de participer modestement au développement de l’individu, c’est quelque chose qui me parle, oui. Et puis, bien sûr, parce que c’est Éric…

Tu l’as fréquenté de nombreuses saisons lorsqu’il était l’adjoint d’Olivier Krumbholz en équipe de France. Qu’est-ce qui te pousse à travailler à ses côtés ?

D’une manière générale, tout au long des années partagées en équipe de France avec Olivier (Krumbholz) et Éric, nous avons entretenu une vraie complicité. Avec Éric, nous nous sommes retrouvés sur plein de points. Il est très carré comme je peux l’être, passionné, travailleur. Il a aussi ce côté épicurien que je partage volontiers, même si nous ne l’avons jamais expérimenté en équipe de France ! Tout ça a beaucoup compté, bien sûr, dans le fait que je m’engage. Je vais apprendre beaucoup à son côté, l’expérience va être enrichissante. Je crois même qu’il a éveillé en moi l’envie de vivre à fond cette expérience.

Tu as toujours eu cette fibre de la transmission, ce sens du relationnel, de la dimension humaine. Éric t’a-t-il aussi choisie pour ça ?

Je pense, oui, que ça a forcément pesé au moment de sa décision. Les deux Éric, Françoise (Nicole), ont une vraie appétence pour le « faire équipe » qui suppose une organisation incluant des échanges entre les personnes. Éric (Baradat) qui chapeaute toute la filière est très paternaliste, au sens où il met le plus grand soin dans le développement individuel de la jeune joueuse et, à me sens, ce côté humain est essentiel.

As-tu déjà, justement, échangé avec Éric Calcagnini et le reste du staff ?

On a partagé une journée de travail il y a deux semaines. Je pense que j’avais déjà passé une sorte d’entretien d’embauche l’année dernière lorsque j’avais été sollicitée sur un Rassemblement Inter Générationnel (RIG) sur une journée. J’avais participé à un entraînement, j’avais amené un peu de régulation individuelle pendant la séance. Éric (Calcagnini), je ne le connaissais pas, sinon pour l’avoir croisé parfois, alors que j’ai connu Fayssal (Souhir) lors de mon passage à Nantes.

Avec un époux entraîneur (Guillaume Saurina à Pontault-Combault), tu n’avais jamais été tentée de franchir le pas ?

Non, je n’ai jamais eu l’ambition, et je ne l’aie d’ailleurs toujours pas à l’heure actuelle, d’être un jour numéro 1. Ce qui m’intéresse en revanche, c’est donner l’envie, m’acquitter de missions ponctuelles, précises. Effectuer un travail plus partiel, être en marge d’une séance pour procéder à des ajustements individuels, donner quelques consignes collectives en défense parce que j’ai évidemment une appétence particulière pour ce domaine-là. Ce rôle d’adjointe correspond parfaitement à l’idée que je me fais de ce métier.

Tu as effectivement été bercée par la culture défensive de Christophe Chagnard à Nîmes, celle d’Olivier et Éric en équipe de France. On imagine que tu auras ton mot à dire dans ce secteur…

Avec Éric, nous avons un langage commun dans ce domaine. Nous sommes plus que convaincus par les vertus de la défense. Sur le terrain, déjà, lorsque de petites jeunes arrivaient, j’essayais de les prendre sous mon aile, de les aider lorsqu’elles étaient en difficultés. Je pense que je saurais trouver la bonne attitude. Mais je vais essayer d’être utile différemment aussi, dans la prise en compte individuelle de la joueuse notamment. 

Pourquoi y a-t-il aussi peu de femmes à ce poste ? Seulement trois en Ligue Butagaz Energie et une en D2F ?

Très sincèrement, pour les sportives de haut niveau notamment, je pense que c’est compliqué d’enchaîner sur ce même rythme, et d’envisager une vie de famille sereine. A un moment-donné, tu aspires à d’autres choses, d’autres équilibres.

Tu disais avoir passé tes diplômes à Nantes ?

J’ai obtenu le Titre 5 fédéral en 2021.

Tu disais aussi, à l’issue de ta carrière, que tu aspirais à un peu plus de liberté, que tu souhaitais avoir la mainmise sur ton emploi du temps. Avec la préparation du CDES de Limoges, ton rôle de consultante sur beIN SPORTS, tes conférences en entreprise, l’entraînement de l’équipe de France U20F, ce n’est pas gagné…

Sans oublier que j’accompagne aussi des joueuses et des joueurs sur la partie placements financiers. En fait, je fais plein de choses différentes, mais des choses que j’ai choisies et dans lesquelles je me réalise. J’en parle souvent avec Laurent Frécon de la cellule FIR (Formation, Insertion, Reconversion) auquel je dis que j’ai parfois le sentiment de pousser le bouchon un peu loin. Il me répond toujours : mais tu as aussi besoin de ça pour avancer. Je sais que cette année va être dense. L’année prochaine, j’aurai le CDES en moins. Mais quand je fais le point sur ces activités, je constante que toutes ces choses m’apportent beaucoup. J’ai besoin de cette forme de pluralité pour être épanouie. Je suis aussi une maman bien présente pour mes petits loulous. Et une épouse présente pour mon chéri. J’aime bien, d’ailleurs, échanger avec lui sur ce métier, être présente pour lui. Il existe une variable d’ajustement par rapport aux conférences, et je peux aussi me libérer quelques moments pour des vacances en famille. J’essaie de trouver la bonne équation, parce que je me sens d’abord chanceuse d’avoir toutes ces opportunités.