Dimanche après-midi, à Vienne, l’équipe de France s’est inclinée dans la petite finale de l’EHF EURO 2024 face à la Hongrie (24-25), deux jours après avoir perdu en demi-finale face au Danemark (22-24). Après la rencontre, le sélectionneur Sébastien Gardillou fait le bilan de sa première compétition sur le banc de touche en tant que numéro un.
Sébastien, dans quel état d’esprit es-tu après cette défaite ?
En premier lieu, je suis fier de mes joueuses. En deuxième, je commence à avoir de l’expérience et en troisième, bon an mal an, on a fourni un spectacle intéressant. On a fourni un match intense pour les gens dans la salle et devant leur télé. Voilà où j’en suis…
Comment expliquer votre manque d’efficacité à la finition ?
J’ai regardé les chiffres, parce que j’aime bien conforter ou infirmer mes sensations avec les chiffres. On est à 59%, elles sont à 58. Posez-leur la question si elles sont satisfaites de leur efficacité. On sait qu’on a des lacunes dans le secteur, je l’entends suffisamment souvent. On joue avec nos armes du moment. Les filles ont fait preuve d’abnégation, elles se sont données…Tirer fort comme un mulet dans le but, ça va pas faire avancer le handball. Mais nous on n’a pas ça, et les Hongroises ont plus la possibilité de le faire.
Mais quand même, comment résoudre ce problème récurrent ?
Il faut travailler d’arrache-pied, dans notre formation, à mon sens. La compétence technique doit être mieux exécutée, de manière plus exacte. Il faut qu’on se remette au travail. Je pense qu’on a beaucoup bossé pendant longtemps, je ne dis pas qu’on ne travaille pas ou qu’on ne travaille plus. Mais on fera le constat avec mes collègues, tout le monde progresse. Ce qu’on a réussi à faire pendant des années aux dépens des autres, c’est en train de nous rattraper. Tout le monde travaille du mieux possible, et on va continuer à le faire.
Tu disais être fier de tes joueuses. En quoi exactement ?
Je suis fier parce qu’on faisait le constat que l’équipe de France, défensivement, n’avait pas pris de volume contre le Danemark. Ce n’était pas forcément vrai. Dans l’attitude et la manière peut-être, mais on s’est aussi fait défoncer par Mette Hansen. Ce soir, les filles ont haussé le niveau d’engagement, elles ont été totalement impliquées dans les choix on a beaucoup échangé et c’était mieux. On prend 25 buts, on se rapproche de ce qui m’intéresse au niveau défensif. On a été ambitieux et audacieux sur la fin, peut-être trop sur la dernière balle, mais si Tamara l’attrape, ça aurait été tellement magnifique…
Quel bilan fais-tu de cette compétition ?
Il y a plus de positif que de négatif. On a seulement tendance à se rappeler la fin, le fait qu’on finisse sans médaille. Mais de mon côté, je me rappellerai de tout. J’avais comme objectif une médaille, on n’y est pas parvenu. beIN Sports titrait « nouvel échec de l’équipe de France », force est de constater que c’est la vérité. Sur cette compétition, on n’a pas loisir à festoyer avec une troisième place.
Les filles avaient un petit sentiment de gâchis. As-tu envie de leur dire que la fin n’effacera pas le mois passé ensemble ?
Si c’est ce qu’elles vous ont dit, je ne pense pas que ça soit lié à ça. Mais l’humilité, c’est bien. Ce sont des joueuses qui ont beaucoup gagné, qui ont à coeur de gagner encore, mais tout le monde progresse. Si on ne fait pas ce constat-là, elle comme moi, on est mal barré.
C’était ta première compétition en tant que numéro un. Comment t’es-tu senti ?
Sincèrement, je me suis beaucoup amusé. Je ne pensais pas que je m’amuserais comme ça, je pensais avoir beaucoup plus de pression, des médias ou du public…Peut-être que j’étais prêt à la gérer, finalement. Pour être honnête, ça me donne encore plus envie de travailler. Ce n’est pas mon genre de m’apesantir, je n’étais pas du tout content à la fin pour des raisons personnelles. Mais j’ai un peu discuté avec elles, pour moi ce n’est pas un épilogue, mais un commencement.
Dans ce tournoi, les cadres ont répondu présentes mais le banc a peut-être été un peu en deça. Est-ce un constat que tu partages ?
Peut-être qu’on n’a pas fait le nécessaire pour que le banc soit au niveau ! Ce soir, les filles rentrent mais dans des conditions super difficiles. Pauline rentre sans même s’échauffer, elle rate, qu’est-ce que vous voulez que lui dise ? Bah rien, que je l’adore. Pour le reste, je ne suis pas sûr que la Hongrie ait fait des masses de rotations, ou que la Norvège et le Danemark en fasse beaucoup plus. J’ai eu à coeur d’en faire beaucoup mais parce que j’ai emmené 20 joueurs pour préparer la suite. Et que c’est pour ça qu’on m’a nommé sélectionneur.
Cette quatrième place signifie aussi que vous n’êtes pas qualifiés directement pour le prochain EURO…
J’ai quand même bon espoir d’y arriver, quand on voit que les trois premiers sont qualifiés. Les nations progressent, je n’ai pas l’outrecuidance de penser que les autres vont nous dérouler le tapis rouge, mais peut-être que devoir jouer ces qualifications ne sera pas une mauvaise chose. Peut-être qu’on va pouvoir travailler différemment, avec des matchs à enjeu plutôt qu’avec des matchs amicaux, ça pourrait être quelque chose de bien.
As-tu l’impression de mettre un point final à une année totalement folle ?
Complètement. On est fatigué, tous. Elles le sont, elles ont la malchance de repartir très rapidement sur le pont. Les rythmes sont complètement fous. Je suis exténué, je ne vous le cache pas. Quand j’ai fait les formations à l’INSEP, on nous a dit qu’il fallait un an pour récupérer des Jeux. Les spécialistes disent ça, et nous on enchaine quatre mois après. C’est ce qui fait que je suis fier de mes joueuses. Ca a de la gueule ce qu’on fait. Oui, ça serait super de gagner les compétitions, mais quand on a fait 2022 et la quatrième place, ça nous a mis un bon coup de pied au cul pour avancer, même si on était dans les objectifs. J’ose croire que ça fera la même chose cette année.