Atteinte de sclérose en plaques, elle a mis un terme à sa carrière professionnelle en décembre 2021, à 29 ans, mais continue d’entretenir sa passion d’une autre manière.
Lorsque tu as décidé de donner un coup de main à Roz hand’Du 29, t’attendais-tu à vivre ce type d’émotions ?
Je m’y attendais sans m’y attendre. Le milieu amateur est un milieu que j’avais quitté quinze années auparavant, et je redécouvrais ce monde en quelque sorte. Les résultats ont fait que certaines émotions, oui, ont ressurgi.
Avec plus de 6 buts de moyenne, tu as largement contribué à la montée en N1…
C’est la première fois de ma vie que je termine meilleure marqueuse d’une équipe. Je n’étais pas forcément là pour ça, plus pour gérer le rythme du match, organiser le jeu, apporter mon expérience, mais il y a eu quelques blessées en début d’année 2023, et je me suis mise à plus scorer.
As-tu été surprise par le rythme de la N2 ?
Il est complètement différent, c’est vrai. Mais il me convenait parfaitement parce qu’il était compatible avec mon nouveau travail au sein du Brest Bretagne Handball. Nous avions quatre séances par semaine et il m’aurait été difficile d’en faire beaucoup plus. Au départ, j’avais un peu peur en termes d’investissement et de rigueur, mais j’ai au contraire trouvé un club extrêmement rigoureux, un club avec beaucoup de motivation et d’envie.
Tu viens de signer pour une saison supplémentaire avec le club de Rosporden. Ça signifie que tu gères de mieux en mieux les effets de ta maladie ?
Absolument. J’ai arrêté ma carrière professionnelle au moment où je changeais de traitement, où je passais de première à deuxième ligne. Aujourd’hui, je ne me rends à l’hôpital qu’une fois tous les six mois et je n’y reste qu’une journée. Durant ces six mois, je vis totalement normalement. La maladie est stabilisée. Auparavant, une semaine de récupération était nécessaire parce que le traitement était lourd. Là, trois ou quatre jours suffisent. Le club me fait confiance dans la récupération par rapport au traitement. Il accepte que je ne m’entraîne pas, où que je ne joue pas si un match est programmé.
Envisageais-tu seulement de rejouer au handball après avoir prématurément mis un terme à ton contrat avec les Neptunes de Nantes en décembre 2021 ?
Très clairement, j’ai mis ma carrière entre parenthèses à ce moment-là. Et quinze jours avant de signer à Roz hand’Du 29, il n’était absolument pas dans mon esprit de rejouer au handball. Mais je connaissais le coach, j’ai rencontré les dirigeants et tout s’est mis en place. J’ai posé quelques conditions, mais pas tellement parce que lorsque je m’engage, je m’engage à fond.
Pourrais-tu redevenir joueuse professionnelle ?
C’est une question à laquelle je ne peux pas répondre. Je ne me la pose même pas. Mon quotidien me convient. Je vis au jour le jour, alors je ne ferme pas la porte, il ne faut jamais dire jamais. Rejouer avec des pros, pourquoi pas… Mais je suis très bien dans ce que je fais.
Comment as-tu vécu l’annonce du diagnostic de Sclérose en plaques en décembre 2018 ?
C’était d’autant plus compliqué que ça ne s’était jamais vu. Aucun sportif de haut niveau n’avait poursuivi sa carrière, sauf dans les épreuves handisports. Le plus compliqué a été de l’annoncer à Gérard (Le Saint) et Denis (Le Saint) mes présidents. Je jouais à Brest à l’époque. Je les savais proches des joueuses, mais je ne pensais pas qu’ils puissent être aussi humains. Ils m’ont dit : si tu ne peux plus jouer, tu resteras avec nous, tu feras autre chose. Je n’avais jamais rien fait d’autre que du handball dans ma vie, et sentir que ces Hommes, ces grands Hommes ne voulaient pas me lâcher, m’a fait un bien fou. J’avais envie de me battre pour moi, bien sûr, mais pour eux aussi. Je suis ressortie de l’entretien en me disant : quoi qu’il arrive, je vais m’accrocher.
Ça a été dur de revenir sur le terrain ?
Le traitement a très bien marché, mais j’ai perdu du poids, beaucoup de poids. Laurent (Bezeau), qui était alors mon entraîneur, m’a dit : « tant que tu n’auras pas repris huit kilos, tu ne seras pas sur le terrain. » Alors je bossé pour reprendre de la masse. Je faisais une première séance à six heures du matin avant d’aller à l’hôpital, une seconde dans la journée. Et j’y suis arrivée. Ensuite, en mars ou avril, j’ai dû changer de traitement, mettre un nouveau protocole en place. J’ai signé à Nantes, et Yoann Choin-Joubert m’a lui aussi très bien accompagnée. Je devais faire des aller-retour à Brest pour les soins, je n’étais pas toujours au mieux de ma forme, mais il m’a soutenue, il m’a même proposé du travail alors que je découvrais à peine ce club.
Quelle est la nature de ta collaboration avec le BBH aujourd’hui ?
Je suis commerciale pour le club. Gérard (Le Saint) m’a embauchée, il a décelé chez moi des compétences, une sensibilité pour la vente que je n’imaginais absolument pas. J’apprends tous les jours à ses côtés et à ceux des autres salariés. C’est du sponsoring classique, je m’occupe aussi de la partie comités d’entreprises, et à tout ce qui touche au handball les soirs de match.
T’es-tu formée pour ce métier ?
J’ai fait une école de commerce en distance. J’ai obtenu mon diplôme en juin 2022, un DUT Tech de Co.
Comment as-tu vécu l’initiative de Gérard Cantin qui a relié en marchant la maison du handball à Créteil depuis sa Bretagne natale pour soutenir « Une oasis pour la sclérose en plaques » ?
J’ai clairement été touchée. Tout ça a même beaucoup de sens. Gérard est vice-président de la Ligue de Bretagne en charge du Finistère, et il connaît bien Françoise (Duquesne), la médecin du BBH qui est comme ma deuxième maman. Mettre ainsi en lumière la maladie fait bouger les choses et peut même lever certains préjugés. Les gens peuvent ainsi mieux se renseigner, mieux comprendre. Non, la sclérose en plaques ne te cloue pas forcément sur un fauteuil. Oui, tu peux vivre.