S’il avait porté le brassard en mars dernier en raison de l’absence de Valentin Porte, Luka Karabatic a bouclé sa première semaine internationale dans son nouveau rôle de capitaine. Il évoque cette nouvelle fonction et tire le bilan des deux matchs de qualification.

Était-ce bien imaginable qu’un joueur dans l’histoire du handball, de la trempe de Nikola, boucle vingt saisons internationales ?
On pense que ce sont des moments qui n’arriveront jamais. C’était génial de pouvoir le célébrer comme ça. Bien sûr on sait tous ce que Niko représente. Alors c’est top d’avoir des occasions comme jeudi soir, de marquer le coup, surtout de lui faire la surprise car il ne s’y attendait pas du tout. Le fait que ses enfants, Alek et Nora soient là, Géraldine aussi, c’était vraiment une belle soirée, un bel hommage.

Quel regard portes-tu sur ton aîné ?
Je suis admiratif de ce qu’il a fait, de ce qu’il fait et de qui il est. On l’a vu avec tous les joueurs jeudi soir à Poitiers qui ont un immense respect pour lui avec tout ce qu’il a fait pour le handball français. C’est normal de le célébrer comme ça. Et ce n’est pas la fin car Niko a encore de l’envie.

Justement, ses performances cette semaine ont démontré – si c’était nécessaire – son impact et son influence intacts au sein du groupe et sur le terrain. Le vois-tu poursuivre encore longtemps avec le maillot bleu sur les épaules ?
Malgré les années, il est en effet toujours performant. Il pèse toujours dans le jeu. Niko le répète souvent : « Tant que je serai en mesure d’apporter quelque chose… Je m’arrêterai au moment où je ne pourrai plus ». Niko est toujours là et il aide toujours beaucoup l’équipe. On est contents.

En tant que capitaine, lui as-tu délivré un message particulier avant les matchs de la semaine ?
Franchement, je n’ai pas grand-chose à lui dire car Niko est plus âgé que moi et il a plus d’expérience.

En quoi la fonction de capitaine en club et en équipe de France est-elle éventuellement différente ?
Ce n’est pas tout à fait la même chose car on sent un peu plus le poids des responsabilités. Avec l’équipe de France, nous sommes tous sélectionnés pour apporter quelque chose en plus. Je n’ai pas fondamentalement changé mon fonctionnement mais je suis plus présent et je parle un peu plus au sein du groupe.

Comment la relation avec le staff a-t-elle évolué, en particulier les échanges avec Guillaume Gill et Érick Mathé ?
J’avais déjà cette habitude car Guillaume et Érick fonctionnent dans l’échange. On s’inscrit dans une certaine continuité : j’essaie d’être aussi un relai pour les joueurs et, entre le staff et les joueurs.

Le capitaine peut devoir aussi parfois s’effacer derrière l’intérêt général ?
Ce n’est pas un problème à porter un sujet qui est accepté par la majorité du groupe. J’essaie toujours d’être dans le consensus car dans un groupe il existe des sensibilités différentes. Je me pose en rassembleur et je mets éventuellement mes états d’âme de côté.

Les deux victoires de la semaine sont-elles totalement satisfaisantes ?
On s’attendait à gagner à remporter ces deux matchs mais peut-être pas avec autant d’écart. Nous avons su mettre la manière pour réaliser des écarts assez larges. Ces victoires ont été construites en mobilisant tous les joueurs d’un groupe assez large. Sur chaque match, nous avons mis de l’énergie pendant 60 minutes et nous avons terminé fort nos matchs.

Après 6 mois sans rassemblement, comment se reconnecter pour être performant ?
L’équipe s’est rapidement mise en action. Cela fait maintenant trois compétitions que l’on fonctionne avec Guillaume Gille qui a mis beaucoup de choses en place. Il existe un socle qui permet de rebasculer en mode équipe de France et de mettre en place nos savoir-faire. Tout ce travail effectué depuis deux ans, permet une mise en route plus rapide.

Sur le poste de pivot, voici plusieurs compétitions que vous partagez le poste avec Ludovic Fabregas et Nicolas Tournat ?
Nous disposons d’un groupe élargi avec plusieurs très bons joueurs par poste et logiquement il y a des rotations. Cela fait partie du fonctionnement et lorsque nous sommes tous les trois, nous savons que nous jouerons chacun par période. C’est bien car cela permet de ne pas toujours tirer sur les mêmes et de garder de la fraicheur.

Où en es-tu avec ce pied gauche douloureux qui t’a fait souffrir et même manqué des matchs en début de saison ?
C’est un peu au jour le jour. Je n’ai pas vraiment le temps de récupérer et de travailler dessus. Donc pour l’instant, cela reste un peu compliqué. J’essaie de faire au mieux mais ce n’est pas optimal.

La fin de carrière de ton aîné et son avenir sont souvent évoqués mais ces questions se poseront bientôt aussi pour toi, non ?
Je commence à y penser mais je ne sais pas vraiment ce que je ferai, il n’y a rien de précis. Le handball est ma passion et j’aimerais continuer à m’impliquer, mais peut-être pas de manière continue. En fait, on verra en fonction des opportunités car j’ai aussi envie de voir autre chose et de prendre du temps pour ma famille.

En quoi le titre olympique de Tokyo permet de se projeter plus sereinement sur ceux de Paris 2024 ?
Avoir touché à ce qu’il fallait toucher dans le sport, c’est certain que cela dégage un sentiment de plénitude. Cela peut-être aussi à double tranchant : se reposer sur tes lauriers et perdre un degré d’envie et de précision ou, à contrario, décupler ton envie d’y retourner. Il existe 1000 chemins possibles pour aller au bout d’une aventure.

Selon toi, la France sera-t-elle encore favorite en janvier prochain pour le Mondial ?
Bien sûr. À chaque compétition, on arrive très souvent dans les derniers carrés et dans les matchs couperets. Nous ferons une nouvelle fois partie des favoris mais un Mondial, c’est très long avec beaucoup de matchs, il faudra donc bien gérer. Nous sortons d’une 4e place sur le dernier Euro alors je pense qu’on se rendra en Pologne avec un esprit revanchard. On a hâte d’y être.

Propos recueillis par Hubert Guériau