L’équipe de France féminine U18 a occupé le terrain et défrayé la chronique au cœur de cet été 2023. Le jeune collectif d’Olivier De Lafuente a enchaîné avec la médaille d’or du Festival Olympique de la Jeunesse Européenne (FOJE) et le titre européen. Un doublé inédit que nous narre son sélectionneur, témoin et acteur de la construction d’une filière féminine qui tourne à plein régime.
Que faisais-tu il y a seize ans lors de la précédente conquête continentale d’une équipe de France de la catégorie ?
Je me suis d’abord investi dans le Nord sur la filière féminine au début des années 2000, je croisais souvent Pierre Mangin et Paul Landuré, respectivement à la tête des jeunes et des juniors à l’époque. Et c’est justement à cet été 2007 que ce dernier m’avait sollicité pour l’accompagner sur un franco-allemand. Je suis resté derrière dans son staff des juniors, à partir de la seconde année de la génération 1988-89, ponctué d’un mondial en Macédoine je me souviens… Jusqu’à une médaille d’argent mondiale en 2012 en République tchèque… Puis après la réorganisation de la DTN en 2012, j’ai fait trois générations de cadettes, avant d’arriver à la tête des jeunes, aujourd’hui U18, à compter de 2016.
Qu’est-ce qui peut permettre encore de se bonifier ?
Ce qui est clair c’est que le handball féminin a énormément progressé sur les dernières années, notamment dans sa structuration. Il y a tout une machinerie qui s’est mise en place autour des jeunes filles, que ce soit au niveau fédéral, des clubs, de la LBE, qui permet de les accompagner et les amener effectivement à un meilleur niveau. On peut rajouter le fonctionnement de la DTN, avec un décloisonnement dont les RIG en sont la plus belle preuve. Cette prise en compte globale, spécifique et sur la durée, avec un système des clubs et des pôles qui s’est enrichi, est automatiquement une plus-value. Il y a plein de petits domaines à gagner, à partir d’un lien encore plus fort entre tous les partenaires. Les RIG sont vraiment un exemple en ce sens, entre cours de soutien, bilan médical, suivi socio-professionnel, de l’accompagnement aux habilités mentales. Elles font moins de handball que tout le reste sur la semaine. L’accompagnement de l’être humain, autant que de l’athlète, conduit à l’épanouissement de la joueuse certainement. Les RIG sont une sorte de centre national délocalisé, et cela vient bien se greffer à notre philosophie générale.
En référence notamment à la Hongrie, qui domine chez les jeunes. Vous prouvez, avec ce titre, que l’on peut faire différemment que de regrouper à l’année des joueuses vite déracinées ?
Comme la Suisse et les Pays-Bas également, nous sommes sur des petits pays de conception différente. C’est la preuve aussi que notre système peut permettre d’y arriver, sans se cacher que c’est aussi une question de génération, et celle-là, bien équilibrée, peut avoir de l’ambition. Elle vient de le démontrer. Les Hongroises compensent souvent par une qualité collective supérieure, c’était notre tour cette année autour de très bonnes joueuses. Les étoiles étaient bien alignées, entre de bonnes joueuses à tous les postes et des remplaçantes au niveau, cela aide. Nous sommes l’équipe par exemple qui a le moins de temps d’utilisation de son sept majeur durant cet Euro. C’est un luxe de pouvoir économiser des joueuses sur la longueur d’une compétition, et d’arriver avec plein de fraîcheur sur le dernier carré.
Est-ce une médaille d’or qui sacre encore plutôt une génération qu’un système ?
Non et je pense que les deux sont indissociables, car le système fait quand même avec les athlètes qu’il a sous la main. Lorsque tu as une génération qui a un peu plus de qualité ou un peu moins de creux sur certains postes essentiels, c’est toujours plus facile de performer. Par exemple, si demain on perd nos trois gardiennes principales, cela va devenir plus compliqué derrière. Donc je dirais que cette génération vient récompenser un système qui fonctionne, au gré d’une densité peut-être supérieure. Mais celle d’avant, des 2004-2005, qui a vécu le COVID, a fait 5 au Mondial l’an dernier, et 6 à l’Euro avec Éric, dans une partie de tableau où l’on a lutté avec la Hongrie et le Danemark, les deux finalistes. Il commence quand même à y avoir une permanence dans les résultats depuis quelques années.
Est-ce une médaille d’or qui sacre encore plutôt une génération qu’un système ?
Non et je pense que les deux sont indissociables, car le système fait quand même avec les athlètes qu’il a sous la main. Lorsque tu as une génération qui a un peu plus de qualité ou un peu moins de creux sur certains postes essentiels, c’est toujours plus facile de performer. Par exemple, si demain on perd nos trois gardiennes principales, cela va devenir plus compliqué derrière. Donc je dirais que cette génération vient récompenser un système qui fonctionne, au gré d’une densité peut-être supérieure. Mais celle d’avant, des 2004-2005, qui a vécu le COVID, a fait 5 au Mondial l’an dernier, et 6 à l’Euro avec Éric, dans une partie de tableau où l’on a lutté avec la Hongrie et le Danemark, les deux finalistes. Il commence quand même à y avoir une permanence dans les résultats depuis quelques années.
Que représentent ces médailles d’or pour ce groupe ? Cela récompense quelle qualité principalement de cette équipe ?
D’abord un parcours démarré il y a deux ans avec Mickaël Danigo par trois matchs contre la Pologne, dont une défaite, puis prolongé l’an dernier par la 3e place à l’European Open aux côtés de Vincent Philippart. Cette année, au gré des deux stages contre les Pays-Bas et l’Allemagne, sans défaite et des prestations par moment très solides, cela a pu générer chez elles de la confiance et un peu d’ambition. D’ailleurs, lorsque l’on s’est retrouvé le 1er juillet, au début de l’été, on s’est donné pour objectif de jouer le 13 août, un match des finales de l’Euro. Maintenant, il ne suffisait pas de le dire. Le FOJE a vraiment marqué une montée en puissance dans notre jeu, offensif notamment, tout en ayant toujours cette assurance tout risque que pouvait être notre défense afin de créer des écarts en quelques minutes. L’équipe a vraiment bien travaillé, tout au long de l’année, dans tous les domaines, avec en point d’orgue pour moi cette activité défensive exemplaire en finale contre le Danemark. Donc oui c’est la victoire du travail avant tout.
Quels sont les dangers dans la formation à cet âge ?
Elles grandissent très vite actuellement, elles sont déjà dans des collectifs seniors, mais elles sont quand même des adolescentes de seize ans. Et heureusement. Nous on essaie surtout de faire en sorte qu’elles comprennent le jeu, qu’elles se connaissent dans leurs capacités et leurs faiblesses, de leur donner des solutions supplémentaires afin qu’elles aient toujours des axes de progression… Il ne faut surtout pas que ce soient des exécutantes, mais qu’elles s’approprient vraiment le jeu. Car elles ne sont qu’au début d’un long chemin tortueux et pentu. Et celles qui s’arrêtent risquent de dégringoler. Alors que rester sur le toit du monde, éventuellement dès l’année prochaine, est un joli défi à relever. Rien n’est acquis aujourd’hui. C’est la manière dont elles vont continuer à travailler ce potentiel qui va être déterminant. Surtout pour elles et forcément aussi l’équipe de France de leur catégorie.
Et à titre personnel, qu’est-ce que l’on ressent comme formateur après un tel été ?
Avant toute chose, je tiens à associer l’intégralité de mon staff qui a magnifiquement travaillé cette année, et notamment mon adjointe Jessica Barbier. On peut tous ressentir la satisfaction de leur avoir permis de se réaliser, que ce soit dans le handball ou au niveau de l’humain. Avec l’enchaînement des compétitions, il fallait bien gérer les différents moments et nous avons eu à la fin le sentiment d’un groupe qui vivait très bien. Nous avons encore envie de les faire avancer, progresser, performer, et pourquoi pas gagner de nouvelles médailles, d’or si possible. Cela ne va rien changer à notre organisation et nos méthodes à la rentrée. C’est le meilleur moyen d’enchaîner. À condition de travailler encore plus fort et toujours mieux.