Figures incontournables de l’arbitrage français, officiant aussi bien en Liqui Moly Starligue qu’en Ligue Butagaz Énergie, ainsi que sur les rendez-vous européens, les sœurs Charlotte et Julie Bonaventura seront de l’Euro masculin qui s’ouvre ce jeudi. Une nouvelle compétition de haut niveau qu’elles accrochent à leur « palmarès », sans que cela ne devienne une routine.
La journée touche presque à sa fin et l’heure du rendez-vous téléphonique que l’on s’était fixé avec Julie Bonaventura s’affiche. Il est 19 h pile. Un horaire d’échauffement quand les championnats ou les grandes compétitions battent leur plein, mais pour l’instant, c’est petite trêve pour le binôme français avant d’embrayer sur un rythme effréné. La discussion risque néanmoins d’être à bâtons rompus tant on connait la passion de notre interlocutrice pour la chose arbitrale. La sonnerie retentit… Une fois, deux fois, trois fois… Premier avertissement, second avertissement, carton jaune… ? Pas le moins du monde ! Puisque, carrée, la voix ensoleillée de l’arbitre lance son plus sympathique « allô » ! On n’attendra donc pas deux minutes sur le banc pour parler terrain. « J’étais en train de terminer ma valise pour partir à Bratislava. » On s’enquiert de savoir si le sifflet et les cartons n’ont pas été oubliés. « Non, ça fait partie des premières choses que l’on range ! (rires). » Ainsi Charlotte et Julie Bonaventura sont de nouveau appelées à représenter l’arbitrage français sur les parquets internationaux avec une fraîcheur et un sérieux qui semblent inhérents à leur carrière : « On est très contentes de représenter la France lors de cet Euro, mais on n’est pas du genre à être fières plus que ça. C’est surtout une vraie responsabilité quand on reçoit une désignation pour un championnat d’Europe comme celui-là. On porte le drapeau de l’arbitrage français. Cela fait des années que l’école d’arbitrage à la française est reconnue et c’est important d’être présents. Mais il ne faut surtout pas se reposer sur nos lauriers. Il faudra travailler dur. La fierté, on l’aura peut-être après quand on aura réalisé une bonne compétition. On a d’abord envie de bien faire. »
« Les instances ont besoin d’arbitres de confiance »
Avec pas moins de trois JO, deux Mondiaux et donc deux Euros hommes et une majeure partie des compétitions féminines depuis 2009, ainsi que des finales disputées à tous les niveaux, la paire fait partie des valeurs sûres au niveau national et international. Un véritable sacerdoce qui nécessite d’être toujours focus sur ses objectifs, avec un état d’esprit de haut niveau, lui aussi. « On s’impose la même rigueur sur une rencontre de l’Euro que sur un match de championnat », insiste la femme en noir. « Parce que, quand on a un certain niveau, les gens attendent une certaine performance et on ne peut pas se permettre le moindre relâchement. On ne peut pas se satisfaire d’un match moyen. L’exigence est très forte envers nous-mêmes car on doit respecter le travail des joueurs et des entraîneurs. Et se respecter nous-mêmes, aussi. Quand il y a des compétitions qui durent trois semaines, le plus dur, c’est de maintenir le même niveau de performance sur chaque match. Il faut que ça soit linéaire. On ne peut pas se permettre un mauvais match un jour, puis d’être bon le lendemain, et de nouveau moins bon ensuite. Les instances ont besoin d’arbitres de confiance sur lesquels elles peuvent s’appuyer. Il faut que les arbitres soient bons tout de suite. Le plus dur, c’est de rester frais et dispo physiquement et mentalement. L’usure ne doit pas s’installer. »
Julie Bonaventura : « Si les Bleus vont au bout, on passe en mode spectateurs/supporters »
Et avoir un peu de chance afin de participer au plus grand nombre de matchs ? Julie Bonaventura de répondre : « Sur un Euro, l’EHF essaye de faire arbitrer deux matchs sur le tour préliminaire à chaque binôme, et ensuite en fonction de la neutralité sportive et du niveau de performance, il va y avoir un écrémage. On va renvoyer des paires à la maison pour le tour principal. Ensuite pareil pour la phase finale. Quand on est Français, on n’a pas trop de chance ces derniers temps car nos équipes sont souvent dans le dernier carré (rires). Mais il n’y a pas de frustration sur ce plan à partir du moment où, de notre côté, on a réalisé de bonnes performances. Si les Bleus vont au bout, on passe en mode spectateurs/supporters et on sera les plus heureuses du monde. Leurs performances, c’est la résultante du fait que l’on peut travailler sur du haut niveau toute l’année en dans nos championnats. On a toujours de très bons matchs. J’ai parfois ri avec certains entraîneurs en leur disant que si les arbitres français étaient aussi bons, c’était grâce à la qualité de leur jeu et de leur travail. Un match comme le Nantes – PSG de la phase aller, c’est du top niveau par exemple, avec deux équipes qui ont extrêmement bien joué, une superbe ambiance et pour nous seulement des ajustages à faire. Ce genre de rendez-vous, tout le monde se régale. On a échangé après le match et tout le monde était content. »
Un regard sur la fonction qui en dit long sur la qualité du duo. « Être arbitre n’est peut-être pas la fonction la plus attirante de prime abord, glisse l’intéressée. « Et on sait qu’on peut parfois cristalliser certaines tensions, mais c’est un rôle vraiment valorisant. Moi je suis toujours heureuse de voir des jeunes qui me disent qu’ils adorent faire ça, ça fait chaud au cœur. Et on sent que ça évolue dans le bon sens, notamment depuis que La Poste est partenaire et qu’il y a les journées de l’arbitrage. Les gens comprennent un peu plus ce que c’est d’être arbitre. Bon après, c’est un peu comme la journée de la femme, il faudrait que ça soit tous les jours (rires) ! »