CTS sur le Territoire de Bourgogne – Franche-Comté, responsable pédagogique de l’IDSF et référente nationale Beach Handball, Joëlle Demouge est l’invitée de l’entretien du lundi au moment où démarre la saison de Beach Handball.
La saison de Beach Handball reprendra le lundi 17 mai avec le stage de l’équipe de France U17 féminine à Balaruc. Forcément, c’est une grande satisfaction mais comment avez-vous procédé pour sélectionner les joueuses ?
En effet, depuis 2019 et l’Euro en Pologne, il n’y a pas eu de rassemblement majeur en raison de la crise de la Covid-19. Nous n’avons pas pu effectuer de stages avec les joueuses, les joueurs, et les entraîneurs car nous n’avions pas l’autorisation de le faire dans la période concernée. Nous avons juste eu le temps de rassembler les U17 filles en Corse en octobre. Par ailleurs, nous effectuons les sélections au travers des compétitions « PPF » et des différents regroupements, nous détectons des profils et des potentiels en totale transparence avec les responsables des deux filières : avec Éric Baradat (PPF féminin) et Pascal Bourgeais (PPF masculin). Auparavant, les entraineurs nationaux conservaient sur leur liste une soixantaine de joueurs/joueuses. En baissant le curseur, des potentiels peuvent ainsi éclore sur le beach et pourquoi pas effectuer des aller-retours entre les deux disciplines (nous enregistrons pas mal d’exemple à ce sujet). La principale difficulté réside dans l’harmonie des calendriers car si l’on veut bientôt tutoyer les podiums internationaux de Beach Handball, il faudra s’entraîner plus en dehors des stages des équipes de France.
Rémi Desbonnet, international A depuis sa première sélection face à la Grèce dimanche passé, n’est-il pas le meilleur exemple de ces possibles aller-retours ?
Oui et d’autant plus qu’il est joueur de champ en équipe de France de Beach Handball. Sur les séances de shoot-out, il réintègre parfois la cage. Rémi le dit clairement : avec le Beach Handball, il voit le jeu différemment. Cette pratique apporte des bénéfices sur les aspects cardiologique, perceptif, tactique, physiologique et physique. Des tests sont effectués avant et après une période de pratique de Beach Handball : les joueurs gagnent deux centimètres de détente sèche à la sortie de la saison. Le Beach Handball permet de progresser physiquement, renforce la tonicité, le gainage et l’amélioration des déplacements.
Il pourrait manquer à l’équipe de France de Beach Handball s’il est invité à préparer les Jeux olympiques…
C’est tout le mal qu’on lui souhaite. Nous sommes super fiers d’imaginer que la pratique du Beach, même pour une toute petite part, lui a permis d’être meilleur sur le terrain en indoor. Il y a aussi la confiance en soi acquise avec le fait de porter le maillot de l’équipe de France de Beach avant même d’être appelé en A.
En quoi la formation est-elle aussi fondamentale ?
Notamment parce que nous avons commencé par la mise en place des équipes de France de Beach Handball avant de lancer une pratique de masse. En quelque sorte, nous avons débuté la pyramide par le haut. Il a fallu réfléchir à un plan d’attaque auprès des territoires pour développer le Beach Handball sans toutefois évacuer le Sandball, une pratique de loisir pour décompresser et s’amuser.
Pour ce faire, nous avons présenté un plan de développement à la Direction Technique Nationale en décembre dernier puis à nos élus avec quatre axes : développement-promotion / Formation / Plan de Performance fédéral / Communiquer-promouvoir. Un guide de la pratique 2021 est édité et disponible ici.
Quelle est la nature de ce guide ?
Comme son nom l’indique, il permet à des clubs, des comités, des centres de loisirs, des municipalités, de comprendre la pratique du Beach, les règles du jeu, le montage du terrain, la disposition du sable, les buts… L’aspect pédagogique est naturellement très présent avec des clips de sensibilisation pour le grand public, les animateurs, les entraîneurs et les arbitres. Des liens sont aussi mis à disposition pour trouver des séances d’entrainement, des matches, des aides pour organiser un tournoi. La conception digitale du guide permettra de le réactualiser et de rajouter des contenus. Parallèlement nous avons animé des webinaires qui ont rencontré un certain succès. Cela démontre l’émulation forte autour de la pratique du Beach Handball qui présente moins de risques dans le contexte sanitaire actuel.
Quelles sont les perspectives d’avenir et de reconnaissance pour le Beach Handball ?
Nous avons effectué une demande de reconnaissance du Beach Handball en tant que discipline de haut niveau auprès du ministère des sports et de l’ANS (Agence Nationale du Sport). Il existe plusieurs critères, notamment la participation de 30 nations au minimum à un championnat du monde. À l’instar du Beach Volley, nous visons que la discipline soit un jour reconnue comme olympique. Avant les Jeux olympiques de Paris 2024, nous souhaitons organiser une grande manifestation à Lille. C’est aussi le souhait de l’IHF et de l’EHF de voir la France rattraper son retard car de nombreux pays jouent, et pas seulement en Europe. C’est la force de cette pratique universelle.
Quelles sont les alternatives pour développer la pratique en dehors des littoraux ?
Une installation « couverte » existe à Rennes, d’autres sont en projet à Houlgate, Montpellier et Bordeaux. Un terrain de beach Soccer (foot) est égal à deux terrains de Beach Handball. La FFF dispose d’une centaine de terrains et nouer un partenariat est une possibilité de développement. De nombreuses collectivités mettent en place des espaces multifonctions sur le sable et nous sollicitent pour l’animation Beach Handball : il ne faudra pas rater le virage. Nous avons aussi mis en place un maillage de terrain, en direction des ligues et des comités afin de faciliter la mise en place de projets de pratique. Certaines ligues disposent de programmes intéressants avec des Beach Handball tours à l’intérieur de leur ligue, c’est pourquoi, nous visons dans les prochaines années au niveau national, certainement à Paris ou en périphérie, l’organisation d’interligues de Beach Handball qui réunirait une équipe senior et jeune (filles et garçons) de chaque territoire.
Outre ta mission nationale sur le Beach Handball, quelle est ta mission principale au sein de la Ligue Bourgogne – Franche-Comté ?
Je suis responsable pédagogique de l’ITFE qui s’intitule l’IDSF (Institut de Développement du Sport par la Formation) en plus du management de l’équipe technique régionale. Mon objectif est de développer encore cet héritage de la formation professionnelle, chère à mon ex-collègue Pierre Blaise. Je suis persuadée que c’est le véritable levier du développement de la pratique car la professionnalisation des clubs passe par la formation et l’emploi. C’est toujours le cheval de bataille du président de la ligue, Marie-Albert Duffait, c’est pourquoi nous proposons de nombreuses formations (du niveau 3 au niveau 6) afin de nous adresser à tous les niveaux d’encadrement et de balayer tous les champs. Au total, une équipe de 40 personnes est mobilisée sur l’ITFE. Si la « maison mère » est à Besançon, nous animons des antennes de formation au Creusot, à Dijon et à Saint-Claude dans le Jura. Disposer d’offres de formation sur tout le territoire favorise l’accès à tous.
Nous avons également signé une convention avec la ligue des Hauts de France pour les aider à développer leur organisme de formation et nous ouvrir d’autres horizons permettant d’enrichir l’expérience de nos stagiaires.
Comment expliques-tu que la pratique féminine est plus développée dans votre territoire ?
C’est juste, avec environ 40/42 % de féminines, elles sont en moyenne plus nombreuses. Le handball féminin est connu et reconnu, plus que le basket et le volley. Les équilibres sont fragiles et il ne faut pas perdre l’engouement autour de la pratique féminine du handball. La qualification régulière de l’ESBF en coupe d’Europe est un élément majeur pour le territoire qui compte, avec en plus Dijon, deux clubs en Ligue Butagaz Énergie. Myriam Saïd-Mohamed, qui m’a succédé au pôle, effectue un bon travail collaboratif avec ces deux clubs et la ligue. Il faut se serrer les coudes car le tissu économique de notre région n’est pas le plus solide. Les acteurs sont ouverts et ont la volonté de travailler ensemble. Je salue aussi l’engagement de Marie-Albert Duffait dans la proximité qu’il entretient avec les clubs et les comités. Il martèle sans cesse que la ligue est au service des clubs.
Quel regard poses-tu sur tes années au pôle espoir féminin de Besançon qui a fourni tant de joueuses internationales ?
J’ai créé ce pôle dont je me suis occupée pendant 25 ans. Pour une petite ligue comme la nôtre, avoir décroché 7 titres de championne de France aux interpoles, et un titre de championne du monde scolaire, est une vraie fierté. En parallèle, j’ai travaillé avec Christophe Maréchal qui a beaucoup fait évoluer le club où j’ai entrainé à ses côtés. Le pôle espoir féminin a évolué, de façon pérenne, avec l’installation de nos propres bâtiments. Avec le siège de la ligue avec son bâtiment central, ses deux terrains et les salles de formation, nous disposons d’un outil magnifique. L’histoire entre la ligue et l’ESBF est forte avec encore aujourd’hui plusieurs joueuses formées au pôle et qui évoluent dans l’équipe première, notamment Chloé Valentini et Alizée Frécon, avec naturellement Raphaëlle Tervel et Sandrine Mariot. Et si je pense aux gardiennes de buts, en particulier Laura Glauser et Catherine Gabrielle, nous avons eu de belles opportunités.
Quelle action particulière la ligue Bourgogne – Franche-Comté a-t-elle mise en place pour soutenir la reprise dans les clubs ?
Si on veut faire perdurer la pratique, il faut aider les clubs à se relever, les soutenir pour retrouver des licenciés. Au-delà des aides financières conséquentes, relayées par les Comités, La ligue va prochainement embaucher 10 apprentis dont les missions seront réparties à 30 % sur la Ligue et à 70 % sur les comités. L’objectif central sera d’aller rechercher les licenciés qui ont déserté et pour cause « la pratique ». Bien entendu il faut aussi réinvestir le milieu scolaire et aider les clubs à accueillir les licenciés « potentiels » avec une démarche plus professionnelle. La notion de maillage du territoire (développement de bassins) et de la pratique du handball pour tous les publics nous anime de façon viscérale.
Propos recueillis par Hubert Guériau